Histoire du cinéma kirghize

Publié le par GERARD Roland

Le Cinéma KAZAKH et KIRGHIZE.
Un cinéma lié aux débuts de l'union soviétique (1920)

Même si certaines sources signalent des projections dès 1897 à Tachkent, on peut dater les débuts du cinéma kazakh aux années 20 à 30 et ils sont liés à la soviétisation du pays. Les réalisateurs, les techniciens, les acteurs sont russes (souvent les actrices du pays étaient assassinées au nom de l'islam) et quand des réalisateurs du pays prendront la parole ils auront été formés à Moscou et tourneront dans le même esprit.

A côté de quelques réalisations folkloriques orientalistes on voit essentiellement des films chargés de répandre les nouvelles valeurs : la collectivisation, la sédentarisation des nomades, l'alphabétisation en cyrillique, le dévoilement des femmes. Le poids du documentaire est essentiel. Comme dans le reste de l'URSS, nous sommes à la période où l'art nouveau doit promouvoir le monde nouveau et la fameuse formation du VGIK (école de cinéma de Moscou) crée des concepts nouveaux dans ce sens.
Il faudra attendre 1938 pour voir le premier long métrage de fiction kazakh et la grande chance du cinéma
kazakh date de la seconde guerre mondiale, où les studios de Moscou se replièrent dans la capitale Kazakh de l'époque, Alma Ata ; une bonne partie du matériel n'en est jamais repartie.

La déstalinisation et l'éveil d'un cinéma national (1956)

L'académisme de la production Kazakh a commencé à se fissurer dans les années 60, à mesure que s'éloignait la figure de Staline. On cherche un ancrage dans les valeurs nationales, on évite les stéréotypes anciens tout en voulant offrir une alternative face au cinéma commercial arabe ou indien, tous deux proches. On cherche aussi à s'appuyer sur les œuvres des grands écrivains du pays.

De cette période le "Festival des 3 Continents" présente cette année 4 films : Une matinée agitée de Karsakbaiev (né en 1926), Les empreintes se perdent à l'horizon (1965) de Begaline (né en 1920) L'épopée d'une mère (1963 ) de Karpov (né en 1920), et La terre de nos pères (1967) d'Aïmanov (né en 1914, mort en 1970, auteur emblématique venu du théâtre et dont les studios d'Alma Ata ont pris le nom en 1984).

Les dates de naissance de toute cette génération montrent qu'il s'agit de cinéastes déjà engagés dans les productions classiques mais qui s'efforcent d'insuffler à leurs films des éléments nouveaux : le titre du film d'Aïmanov suffit à indiquer sa thématique. Le film de Karpov conte l'histoire, classique dans le cinéma soviétique de l'époque, d'une mère dont le fils est mort au front ; il sera intéressant de voir comment il met en valeur le fait que ce soit une mère kazakh.

Peu à peu, dans les années 70/80, on verra apparaître des thèmes liés aux problèmes du pays où des personnages simples, souvent marginaux, permettent de décrire la situation sociale, la confrontation entre le monde rural et la ville inhospitalière, la fragilisation des racines culturelles, la perte des traditions millénaires.

La pérestroïka et l'émancipation artistique (1985)

La période de la perestroïka (à partir de 1985) n'a fait qu'accentuer ces tendances. Certains auteurs que l'on réunira un peu rapidement sous le sigle de Nouvelle Vague prennent leurs marques à cette époque en laissant pressentir que s'écroule là un monde et en ne se contentant pas de faire un constat de contenu mais aussi en cherchant des formes nouvelles.

De cette période, le F3C 2001 présente trois films. D'abord celui de l'auteur qui a ouvert la voie, Chinarbaev (né en 1953), ambitieux tant dans les thèmes que dans le style : Ma sœur Lucie (1985), confrontation dans un bourg kazakh entre une veuve russe, sa fillette et une kazakh et son jeune fils. Un petit poisson amoureux (1989) de Karpilov (né en 1955) qui, bien que, comme les autres formé à Moscou, est très influencé par le cinéma occidental et décrit la rencontre entre un jeune paysan et la grande ville qui lui restera toujours étrangère mais lui permettra de se trouver. Et Terminus (1989) d'Aprymov (né en 1960), bien connu au F3C qui a déjà présenté de lui Le dernier arrêt en 1990, Aksuat en 1999 et Trois frères en 2000. Aprymov est un personnage important de par la conscience qu'il a de son art, sa liberté créatrice dès ses débuts et sa volonté de tourner dans sa langue, le kazakh, même si elle n'est pas comprise par tous les citoyens kazakhs. Terminus, dans un paysage de steppe, évoque le temps arrêté dans un village où revient le protagoniste après son service militaire... il devra repartir.

Le cinéma de l'indépendance ambiguë

L'effondrement du système soviétique et les indépendances de 1991 créent pour le cinéma une situation nouvelle mais parfois ambiguë. De grosses productions officielles (pas toujours menées à terme) vont chercher dans le passé de grands héros mythiques dont l'exaltation est censée reforger une identité nationale tandis que des auteurs plus audacieux vont aborder des thèmes plus délicats comme l'état écologique du pays, le poids du grand voisin, l'occultation des langues et traditions nationales, tout en devant compter encore avec des tabous (l'islam, la corruption, la mafia) en se contentant d'allusions sous forme de toile de fond : les nouveaux pouvoirs n'ont pas tout abandonné des mœurs politiques d'avant et ils ont pour souci de faire oublier l'image désastreuse donnée parfois par leur pays (la mort lente de la Mer d'Aral) Ces cinéastes sont souvent contraints à avoir recours à des producteurs étrangers, notamment français.

Cette époque est représentée par deux films : Dernières vacances (1996) de Karakulov (né en 1965), déjà présenté en 1996 et décrivant, à l'époque soviétique, la révolte de jeunes lycéens contre le système. Et enfin, Battements de cœur (1995) d'Omirbaev (né en 1958), autre auteur important et bien connu au F3C (Kairat en 1992, Tueur à gages en 1998), jetant un regard acéré sur la société de son époque dans un style très pur, sobre, inspiré de certains auteurs occidentaux (Bresson). Ce film a déjà été présenté en 1995 et est à la fois, à travers le regard d'un enfant malade, une confrontation entre la vie rude de la steppe et celle de la ville et entre un jeune kazakh ne parlant que sa langue et les enfants russes de la capitale.

Le cinéma Kirghize

Le cinéma Kirghize, plus jeune que le cinéma Kazakh (premier film en 1942, premier long métrage en 1955) et moins développé que lui (1 film en 1998 contre 8) a été très tourné au début vers le documentaire et le reportage, sous la même influence soviétique et il a suivi les mêmes évolutions que le cinéma Kazakh. Il a aussi montré une grande vitalité à travers des auteurs importants tant pour leurs création que pour leur réflexion sur le cinéma et leur culture nationale. Parmi eux citons surtout Chamchaiev (Coups de feu dans le col de Karach 1968)
et Okeev (Le Féroce 1973).

Publié dans cinéma

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article